Fidélité, erreurs et sincérité

C’est mon anniversaire. Il y a des femmes pour qui ce jour inspire des poèmes, des mots d’amour, des chansons… Il y a des femmes pour qui, en ce jour, on joue de la musique, on écrit ou cuisine. Et il y a moi… Pour moi, il a monté un godemichet sur une scie sabre… Il en a soigneusement choisi le modèle, le réglage…

Pour mon anniversaire, je vais être attachée à un lit et me faire littéralement scier la chatte.
Merci amour !
Il me caresse, m’embrasse. Me bande les yeux. Il pince mes seins, empêche mes mains de le caresser. Je dois rester sage. Il m’attache les mains à la tête de lit.
Je rosis d’excitation, je sens que je vais passer un bon moment…

L’appel téléphonique, l’erreur

Puis, j’entends une vibration inhabituelle. Celle-ci n’a rien d’excitante. C’est celui de son portable. Ça arrive… Deuxième série de vibrations. Il me dit qu’il va voir. C’est son épouse…

Il s’en excuse et prend la communication. Il reste près de moi, car je suis attachée. Je le sens. Mais j’ai les yeux bandés, j’imagine son visage au son de sa voix. Il est contrarié. “Je suis avec Eulalie. Oui… elle est disponible aujourd’hui, on passe la journée ensemble.”

Il raccroche. Un petit silence de quelques secondes semble durer des heures…
Élasticité du temps. Parfois quelques instants s’étirent, cette magie du temps permet de mieux sentir, de mieux percevoir la décision à prendre.
Je suis toujours immobilisée, les yeux bandés. En attente. Je le sens perturbé. Je ne le sens pas disponible à reprendre où nous en étions.

Et en même temps, cela fait si longtemps que nous ne nous sommes pas vus. Nous avons besoin de ce moment ensemble et je sens que nous ne voulons que rien n’entrave notre plaisir des retrouvailles. 
Et puis on m’a promis de me scier la chatte quand même!

Il m’explique, en toute sincérité, que sa femme est surprise que l’on soit ensemble. Il lui avait dit pour notre rendez-vous d’hier soir évidemment. Entre temps, ma journée s’était libérée et nous avions décidé de passer ce jour-ci, celui de mon anniversaire, ensemble, et j’étais revenue. Nos vies sont pleines d’autres péripéties qui fait qu’il a oublié de la tenir au courant de ce changement de plan…

Va-t-elle se sentir trahie ?

Était-ce un mensonge ? Un simple oubli ? Un oubli qui dissimule une culpabilité plus ou moins consciente ? Un choix plus ou moins conscient pour protéger sa moitié d’une jalousie, un choix plus ou moins manifeste ?

Être soi en totale sincérité

Je ne pense pas qu’il ait menti sciemment. Mais, la situation m’évoque les fois où j’ai moi menti. Mon mari sait pour mes aventures, mes relations. Il sait que c’est une de mes sources d’épanouissement et il me veut heureuse, c’est ça l’amour.

Et puis, il n’a pas la force de me changer, ni l’envie de rompre avec moi. Est-il consentant et enthousiaste à ma non-exclusivité ? Je ne pense pas. Est-il enthousiaste à être mon époux ? Oui, je le sais. Et être mon époux, inclut cette donnée : m’aimer moi et, dans le moi, il y a ça : la polyamorie, l’exploration sexuelle des corps.

Au début, il ne voulait rien savoir, comme si ça ne le concernait pas. Un jour, j’ai voulu lui dire les grandes lignes, parce que j’avais l’impression que sinon que je lui serais trop étrangère. S’il ne connaissait pas le nom des personnes des plus importantes de ma vie: mes autres aimés. Ce fut plus dur à entendre. Mais il a évolué. Aujourd’hui, il veut bien tout entendre. Et c’est moi qui suis pudique…

Il sait que je suis avec l’aimé que j’appelle mon professeur. Mais, il ne sait pas qu’il va me tronçonner. Il sait que j’ai été voir l’oiseau la semaine dernière. Il ne sait pas que nous avons fait l’amour au sommet des rochers de Marseille. Il ne sait pas que je fomente des plans avec un pompier. Et quand j’ai fait des expériences BDSM avec un couple, je lui ai parlé d’elle, pas de lui…

Je dissimule. Parfois, j’omets. De temps en temps, je ments simplement, je dis que je vais danser alors que je vais me faire… et peut-être plus…

Parfois pour le protéger. Le protéger des sentiments de jalousie, d’insécurité, d’envie ou de colère que j’imagine qu’il pourrait avoir. Mais je n’en sais rien ! Peut-être par honte. Peut-être que dans le fond, je fanfaronne en écrivant ici sous pseudo, mais qu’en vrai, j’ai (un peu) honte de traiter ainsi le corps de son épouse, le corps de la mère de ses enfants. (Mais m…!, c’est mon corps à moi!)

La peur, la honte… Son éventuelle insécurité, possessivité… Quand je dissimule ou je ments, je fais exister ces sentiments peu lumineux. Alors que quand je fais preuve de courage, d’assumer ce que je suis, je fais exister la sincérité, la confiance en moi et en notre lien.

C’est d’ailleurs ce que je fais avec mes nouvelles relations, depuis quatre ans mes nouvelles relations sont basées sur la sincérité. Ils savent tout. C’est plus simple d’être dans la sincérité totale et d’assumer complètement qui on est en début de relation pour moi. Vingt ans de relation avec mon époux, il y a plus de choses à perdre à être moi-même…

Mais, je crois tout de même en ce chemin, celui de la sincérité, c’est le plus courageux. C’est affronter les peurs, les colères, les hontes et les dégoûts, pour les traverser et transformer en confiance, en amour.

Et je sais que mon amant pense cela aussi.

Prendre soin de l’amour, sincérité

Je gesticule pour ôter mon bandeau. Il m’aide. Je lui dis: “Appelez-la. Prenez le temps qu’il faut. Prenez soin.” Il acquiesce, c’était une évidence pour lui. Il propose de sortir faire un tour pour lui téléphoner tranquillement et en passant, il ramènera quelque chose de la boulangerie. Et euh… Oui, évidemment, il me détache ! 

Il part. Je sens que c’est la chose à faire. Il ne peut être disponible s’il a l’esprit dans la préoccupation pour les émotions de sa femme. Si elle est jalouse, il devra prendre soin de son insécurité. Si elle est simplement surprise, courroucée de ne pas être tenue informé, il devra expliquer, donner du sens à la situation, remettre la sincérité nécessaire en place.

Nous prenons le risque qu’elle s’oppose, qu’elle soit malheureuse. Nous prenons le risque de perdre l’envie de continuer. Mais c’est ce qui est à faire. C’est ce qui est juste. Je sens qu’il a besoin de remettre de la paix et de l’amour dans la relation à son épouse, même si cela doit me coûter quelques heures de folies, même si cela doit me coûter la journée.

En l’attendant, je me prélasse nue au lit. Cela reste un anniversaire sympa. S’il est trop long, je pourrais toujours utiliser la belle wand qui me fait de l’œil…

Mais il est finalement rapidement de retour. Il a oublié la boulangerie. (Décidément, je lui fais perdre la tête à cet homme…) Mais il a le sourire aux lèvres. 
Elle avait juste besoin de savoir. Elle sait. Tout va bien. Sincérité chérie.

Je suis contente pour eux. Compersive, je sens l’amour qu’il a pour sa femme dans ses yeux. Il est heureux de n’avoir pas abîmé leur lien, qu’ils se soient réaccordés.

Compersion chérie

Elle lui a même souhaité de passer un bon moment avec moi, car elle sait que cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas vus.

Elle est géniale. Il se sent aimé. Je le sens heureux. Je suis heureuse.
Et voilà comment transformer ce qui aurait pu être rendez-vous galant échoué en un bel acte compersif polyamoureux.
C’est beau l’amour. À 2, 3 ou peu importe le nombre!

Je suis pleine de gratitude pour cette femme, qui me permet d’aimer son époux et aussi qui l’aime de ses gestes tendres quand je suis loin de lui. Merci ma chère méta, si un jour, tu me lis. À travers lui, je t’aime aussi quelque part.

Et quelque part, en t’aimant toi, j’aime encore plus mon mari qui te ressemble dans l’amour compersif.
Ce quelque part, un bien bel espace…

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